Superstitions et Sorciers - Folklore de Neuville-le-Chaudron lez Philippeville

Époque 1900 à 1918 

Texte original de Clément Dimanche. Les illustrations ne font pas partie du texte original.

Initialement publié dans le cahier n°46, août 2005,  d'Archéophil. Réproduction avec autorisation de Gephil asbl.



Les cloches sont donc parties pour Rome le Jeudi saint après le chant de gloria, pour revenir le samedi après le Kyrie. À ces moments, les cloches, clochettes et sonnettes sonnent à toute volée pendant le chant de gloria. Après la messe, les corals s’empressent de retourner chez eux, de visiter chaque arbuste. Chaque touffe d’herbe pour y trouver les oeufs que les cloches "ont laissé tomber en revenant au clocher". Les mamans avaient colorié ces oeufs avec de la chicorée pour les bruns, avec des feuilles de poireau pour les verts, etc...

 

On peut cuire le pain du jour du vendredi saint, mais on ne peut pas laver le linge : "je bénis la cuiresse et maudis la laveresse" a dit Jésus car, en montant au calvaire, Jésus avait demandé à boire à une femme qui lessivait : il reçut comme réponse de l’eau sale au visage. Plus loin, il rencontre une femme qui cuisait son pein et qui lui donna à manger.

 

Le pain cuit le vendredi saint, s’il est placé en lieu sec, peut être conservé une année.

 

Je connais à Villers-le-Gambon un prisonnier rentré d’Allemagne fin 1945. Sa mère avait conservé une galette du vendredi saint pour son retour. La galette était toujours mangeable.

 

Feu de cheminée : on cassait un oeuf conservé du même vendredi saint, on le jetait dans la cheminée soit par un trou au grenier, soit par le dessus pour éteindre le feu.

 

Le coral portait la lanterne et sonnait tout le long du parcours lorsque le prêtre portait la sainte communion aux malades.

 

A la Toussaint, il "bridait" les cloches (battant attaché avec un "loyin d’via" tout près de la corde). De cette facon, la cloche sonnait sans balancer. Il sonnait une fois sur une cloche, deux fois sur l’autre et trois fois sur la première et ce, depuis les vêpres des morts jusqu’au lendemain matin, heure de la messe.

 

Pour ce faire, les enfants de choeur s’enfermaient dans l’église, au jubé, pour la nuit. Les parents venaient vers minuit leur apporter des boissons chaudes : lait, café, chocolat...

Bien souvent, les enfants avaient bien peur, d’autant plus que certains farceurs venaient tambouriner sur la grosse porte d’entrée.

 

Fête de Noël : les corals ramassaient tous les chandeliers en cuivre dans le village ainsi que des chandelles et, à minuit, ils allumaient cet immense luminaire très impressionant : les chandeliers étaient placée partout là où il y avait un rebord dans les murs de l’église, sur les confessionnaux, etc...

 

L’adolescent fait partie d’une équipe de jeu de balle au tamis, d’une troupe dramatique, d’une société de musique locale ou voisine.

 

Après l’école primaire, il continue ses études ou suit les cours de l’école d’adultes "école du soir", apprend un metier et, en général, travaille très tôt dans une carrière de marbre, dans une ferme...

 

La classe de 1910 (collection privée)


Le 1er avril, il essaie de ne pas se faire "avoir" : chercher du sel rouge pour attraper les lièvres (leur en mettre sur la queue) ; chercher :

- la clé du "tunnel" (gare de Neuville-Sud) ;

- un rond carré ;

- de la ficelle à trois bouts ;

- de la semence de curieux ;

- Dè l’grène cu d’euwîye...

 

En automne, il ne faut pas se laisser prendre au jeu de "Dari" (bête fantastique) : la victime "gamin su l’doû" doit se poster derrière une haie pendant que les autres chassent la bête de son côté... vers le sac et le porte à l’endroit convenu... mais le pauvre chasseur attend, attend... On s’est moqué de lui !

 

Au moment de la sève, les grands gamins confectionnent des "chouflots", des "flûtes", des "mirlitons" en détachant la peau d’une branchette de frêne, de lilas, de saule, en la frappant d’un couteau..., des "chouflètes", des "pètwâres" en enlevant la moelle d’une branche de sureau pour permettre à la baguette de coulisser à l’intérieur...

 

Jeux d’intérieur : jouetes, boutons, cartes (châteaux, à la bataile, au "rwè dèspoyi", au "cinsi rwinè", au valet de pique, au "couyon", au piquet, au rami, à la "manîye"), au jeu de l’oie, de dominos, de dames et aux devinettes...

 

Jeux d’extérieur : balle pelote, au mur, au "tch’fau", à la casquette ; aux barres, à l’arbalète, à la fronde et au kiné (ces 2 jeux furent défendus vers 1913) ;

Jeux sous (boutons) avec bouchon, sur une ligne, avec plaque de plomb en main ; au jeu des "scasses" (échasses), au mouchoir, au "cèle" (cerveau), à l’"bouchait" (courte paille), à compter "le bon Dieu a dit qu’c’était celui-ci, celle-là", au "tchafoumau" (colin-maillard), au saut d’"gadot" (mouton), à la corde, à faire des couronnes, des guirlandes de fleurs, des balles avec des "brâyes dè tchat" (giroflées), au Paradis (marelle), au "coupète" (se toucher ou à t’y-ès), aux mâyes (osselets), au cerf-volant, aux flêches, aux "guîyes" (quilles) 5 ou 9, à lutter "toûrsi", aux "craumulès" (cumulets), à faire le poirier, au tas (moncelêye), à cuire les galettes (dos à dos), à nager dans les étangs et même dans les carrières abandonnées et remplies d’eau (interdit par la loi), courir, pêcher, chasser, braconner (bricoles), tendre aux oiseaux, marauder, fumer des "rampioules" (clématites des haies), aider au montage et au démontage des baraques et du carrousel lors de la "dicauce" (fête communale), courses aux sacs, à la brouette sur laquelle se trouve une grosse boule, à l’oeuf dans une cuiller placée entre les dents, à marcher le fil à coudre, à placer la "queue du cochon" à la bonne place (dessin à la craie sur porte de grange) et ce, avec les yeux bandés, effrrayer les petits, le soir, avec des betteraves évidées contenant une bougie à l’intérieur (grigne-dints), glisser debout , à "cu d’pouyon", sur ciglisse (traîneau) (assis ou à panselète), en file (plusieurs traîneaux accrochés, aux bonhommes de neige (boulome), aux batailles de boulets de neiges, à faire son "image" en se couchant dans la neige ; jeux dans les "boutiques" des menuisiers, sabotiers, charrons, forgerons "marchaus" : farces, luttes, tours de force, soulever l’enclume et faire le tour du billot pour remettre à sa place, lever d’une seule main une varlope, un valet...

 

Les jeunes aidaient souvent les artisans en leur passant les objets, les outils dont ils avaient besoin...

 

Le jour du mardi gras, du carnaval et du grand feu, les jeunes suivent les adultes, en tirant le chariot qui ramasse paille, fagots, ourètes, pétrole, alumettes ; ils portent le panier de "pépère èt mémère", personnages costumés : sarrau bleu, longue jupe et un grand châle.

 

Le jeune homme maintenant fait partie du "comité des fêtes".

Les places des chefs de jeunesse sont repassées le lundi de Pâques. Il va parfois au cabaret dont on remarque le petit fagot de genêts ‘pèton’ au-dessus de la porte.

 

Fin de la deuxième partie.