Le fabuleux destin du Château de Fagnolle de 1900 à nos jours.


17. À la Télé

 

Le mardi soir du 22 septembre 1992 le journaliste Pierre Wiame de Vers L’Avenir se dirigeait vers Fagnolle. En passant par Mariembourg il remarquait "une grosse tache blanche dans la campagne". (1)  Ce n’était que des lumières fortes pointées vers les ruines de Fagnolle.

 

Ce soir-là, une émission de ‘Double 7’ fut enregistrée et transmise en direct à l’ RTBF. Entre 1987 en 1996, le jeu Double 7 fut diffusé chaque mardi soir. Axée sur un thème comme une région ou une commune belge, un couple devait résoudre des énigmes, au studio à Charleroi, et faire des preuves physiques, sur site. Différents cadeaux pouvaient être gagnés.

 

Ce mardi soir à Fagnolle, le candidat était un certain Bernard de Pepinster, déguisé en Robin des Bois ( !), qui devait faire des épreuves comme tirer à l’arbalète, transporter des pierres à bord d’une brouette, hisser le drapeau au sommet de la tour ou encore démonter une armure. Entre-temps sa femme Françoise, qui se trouvait au studio à Charleroi, l’encourageait. Ainsi le couple gagnait des horloges, des meubles de salle de bains et un caméscope.

 

Dans la Salle du donjon restaurée, l’épreuve finale se déroulait : essayer de deviner une marque de bière en goutant. Le Robin des Bois n’y arriverait pas et manquait alors une voiture ou un voyage.

 

Pour cette occasion la salle était pleine de monde : des gens en vêtements médiévaux et les arbalétriers de Chimay y formaient le décor de l’émission, qui finirait par de la musique folk jouée par les groupes Caracole et Jeudi Soir.

 

À l’extérieur, des dizaines de Fagnollis. Les autres se trouvaient sûrement devant la télé.

 

Luc Lowagie d’en conclure : "c’est bien de jouir d’une telle notoriété et de mettre en valeur la ruralité" (2)

 

Dans la Salle du donjon. À gauche de ‘Robin des Bois’ on remarque Bernard Perpète (1961-2006), l’animateur de Double 7 sur le terrain. À l’arrière : les arbalétriers de Chimay. Copyright : Pierre Wiame & Vers L’Avenir – reproduction avec autorisation.

 

18. Entre-temps, les travaux ?

 

Juillet 1991 - Le châtelain de Fagnolle avait en effet de grandes idées : il faudrait que la restauration continuât et que le château retrouve sa grandeur d’antan. Il n’attendait que le feu vert du service régional des fouilles archéologiques.

 

"Luc Lowagie compte lui rendre toute sa vocation culturelle et historique et il espère qu'avant l'an 2000, la forteresse comptera une seconde salle de 9 mètres sur 15, surplombée d'un auditoire de 200 places. Voilà qui lui permettrait d'y fonder un centre de rencontres interuniversitaires, mais aussi d'en refaire un lieu vivant de spectacles, d'expositions et de culture.

Après la restauration de la basse-cour, en façade, dont le look s'inspirera d'un mélange d'architectures moyenâgeuse et contemporaine, on pourra dire que la seigneurie aura vaincu le temps. Au prix des efforts que l'on sait et dont la somme - en travail et en matériaux - approchera alors les cent cinquante millions de francs.

Au programme des tout prochains travaux figurent l'aménagement du parc - qui prendra cours cet hiver - et la reconstruction de l'aile droite du château, où sont enfouies l'ancienne chapelle et la bibliothèque. C'est là que, dans un an, devrait être installé le musée archéologique de Fagnolle. Un investissement qui portera l'addition à quelque 25 millions depuis 1970." (3)

 

En 1992, Luc Lowagie entreprenait des travaux de restauration et reconstruisait des parties en béton banché. Lowagie prétendait alors qu’il "ne fait que perpétuer la tradition de maintien en état du bâtiment, mais avec les matériaux d’aujourd’hui". (4)

 

Ce n’était vraiment pas une bonne idée : entreprendre la restauration avec du béton violait mystère et charme du moyen âge, mais aujourd’hui le béton banché est lui-même en ruine à cause de la corrosion du béton et devrait être démoli. Cette idée d’utiliser le béton banché fut basée sur une interprétation de la Charte de Venise, laquelle stipule que, dans le cadre de restauration des bâtiments classés, tous changements doivent être identifiables. Là, il n’y a pas de soucis.

 

Le château et le béton banché (photo : MS, mai 2016)

 

 Alors le 20 décembre 1993, avec sa mère, Luc Lowagie fondait la société anonyme ‘Château de Fagnolle’ et apportait au capital social de la S.A. entre autres : "un ensemble de parcelles de terrain en nature de pâtures, ruines et marais sis au lieu-dit ‘Vieux Château’... cadastré de trois hectares soixante-cinq ares cinquante-deux centiares". Dorénavant le propriétaire du château fut le S.A. Château de Fagnolle. L’objet : "toutes opérations généralement quelconques, commerciales, industrielles, financières, mobilières, immobilières se rapportant directement ou indirectement à la gestion et/ou l’exploitation et/ou promotion touristique, culturelle, sociale, éducative, scientifique de biens présentant un caractère historique et culturel, ainsi que l’achat, la vente, la mise en valeur, la transformation, l’aménagement, l’exploitation, la location, la gestion, la gérance de tous biens immeubles". Bien sûr Luc Lowagie était nommé président et administrateur délégué. (5) 

 

Toutes les grandes idées, toutes les démarches sur le plan administratif n’auraient pas encore de conséquences réelles : dans les années 1990 il n’y eu pas beaucoup de changements. Bien au contraire, la situation du château se dégradait.

 

19. Les chevaliers de retour

 

Bien qu’en 2003 les événements folk n’aient plus de succès et furent arrêtées fin de l’année, les 12 et 13 juillet, les 26 et 27 juillet et les 23 et 24 août les ruines du château furent à nouveau le décor pour un événement très spécial. Cette fois-ci c’était la Compagnie de la Licorne, résident à Fraire, qui venait animer le public avec un spectacle historique médiéval du XIIIème siècle. La Compagnie de la Licorne fut créée en 1989 avec le but de présenter "un savoir historique par des expositions vivantes et interactive, une culture par la vie et les activités du campement, les arts du spectacle par des combats, de la jonglerie, de l'humour…" (6)

 

Isabelle Mahy de la Compagnie de la Licorne : "Oui, nous avons bien fait des animations en 2003. C'était un parcours dans les différentes parties du château où l'on évoquait différents sujets sur l'histoire médiévale : la cuisine, l'herboristerie, l'art de la guerre et l'héraldique. On terminait par un spectacle dans la taverne. Le premier week-end nous n'avons pas eu beaucoup de touristes mais au bout de quelques week-ends, le bouche à oreilles a bien fonctionné et nous avions un public intéressé." (7)

 



Photos : copyright La Compagnie de la Licorne (reproduction avec autorisation)

Texte : AvB - Correction : Valérie



(1) Vers L’Avenir - SM, jeudi 24 septembre 1992

(2) Vers L’Avenir - SM, jeudi 24 septembre 1992

(3) http://archives.lesoir.be/il-y-a-loin-du-reve-de-scout-a-l-aboutissement-du-chant_t-19910726-Z047J7.html

(4) https://ruine.wordpress.com/2008/10/09/Fagnolle-1992-belgique/

(5) Annexe au MB du 21 janvier 1994, N. 940121-123

(6) http://www.spectacle-medieval.be/licorne/accueil.html

(7) mail 20 mai 2016