Le fabuleux destin du Château de Fagnolle de 1900 à nos jours.


15. Fagnorock 1990

 

Le 14 juillet 1990 les vieilles pierres de Fagnolle subissaient pour la deuxième fois les décibels des groupes rock. Le prix des places : 350 F en prévente et 400 F le jour même.

Les Roses Mortes étaient à nouveau présent et ouvraient le festival avec leur musique sinistre et fantastique.

Alors venait Andy Kirk And The Heatmakers, groupe de musiciens professionnels. Leur musique se situait dans le style des groupes britanniques cultes Genesis et King Crimson, et fut fort appréciée. Avec la programmation d’Andy Kirk And The Heatmakers, les organisateurs présentaient au public pas moins qu’un chapitre important de l’histoire du rock en Wallonie. Entre 1980 et 1986 Andy Kirk, d’origine britannique, en tant que claviériste-compositeur, faisait partie d’Univers Zéro, un des plus intéressants groupes progressifs en Belgique. Avec Univers Zéro il sortait trois albums mémorables : ‘Ceux du Dehors’, ‘Heatwave’ et ‘Crawling Wind’ (albums à emprunter chez PointCulture).

 

En 1987 il forme son propre groupe : Andy Kirk and The Heatmakers, groupe vraiment international. À la basse, il y avait le Carolo William Dunker, aujourd’hui bien connu pour son blues wallon. Dans les années 2000, Dunker a complètement rénové la chanson en Wallon. D’origine polonaise, le batteur Fabrice Ofzarzak, sera un des plus fidèles compagnons de Kirk, car aujourd’hui ces deux jouent encore ensemble et sont occupés à enregistrer toute l’œuvre d’Andy Kirk. Hugues Rausse, Lillois, jouait le sax alto. Il faisait également partie de différents groupes de jazz. Enfin, il y avait le violoniste électrique Jean-Pierre Catoul, originaire de Huy. Musicien extraordinaire, Catoul fut un des plus grands talents dans le jazz et la musique rock de Belgique. Malheureusement, en 2001, à l’âge de 37 ans, Jean-Pierre Catoul mourut dans un accident quand sa voiture fut percutée par celle d'un chauffard poursuivi par la police. (1)

 

Andy Kirk : "Effectivement, je me souviens très bien de notre participation à ce festival fabuleux. On y a passé un moment unique, d'autant plus que Jean-Pierre Catoul faisait partie de mon groupe." (2)

 

Venait alors sur scène, le groupe brésilien sans nom, qui remplaçait avec succès le groupe russe Izgoï.

C’était alors le temps pour Les Garde-fous, groupe local, qui comme en 1989, animaient le public avec un style rock dansant, chanté en français. 

Le groupe Itréma, originaire des Ardennes françaises, clôturaient le festival avec du rock dans la tradition européenne. 

En plus, entre les concerts, ils y avaient des jongleurs et des cracheurs de feu. L’ambiance fut complète.

 

Fagnorock 1990 était à nouveau un grand succès. Le festival gagnait la réputation d’un des plus intéressants événements culturels dans la musique rock en l’Entre-Sambre-et-Meuse, aussi à cause de son décor historique.

 

Malheureusement Fagnorock ne fut pas poursuivi : Daniel Guislain ne pouvait plus assumer sa tâche d’organisateur à cause d’une maladie grave dans sa famille. C’en était fini de la musique rock aventureuse aux ruines du château de Fagnolle.

 

16. Et revoilà les troubadours !

 

"Chers amis folkeux danseurs, musiciens, mélomanes de tout poil, corde, anche, soufflet, godasse, cuiller, et autres ustensile."

28 avril 1990 : Bal folk (à gauche : Bernard Clesse) - photo réproduite avec permission.

 

À partir de la fin de 1990 jusqu’en 2003, un public d’un tout autre genre se réunissait chaque 4ème samedi du mois à la Salle du donjon. Plus de décibels de la musique rock. Pendant que Luc Lowagie tenait le bar, des amateurs de folk y jouaient et y dansaient. Ils semblaient bien que les troubadours d’antan furent revenus.

 

Tout commença par le groupe Caricole, originaire de la région de Couvin, qui avait pour répertoire des musiques wallonnes, finlandaises, françaises et flamandes. Le groupe invitait d’autres groupes et musiciens, tels que Fagn’Arts, Orion, Salon Ambroisine, Ronde de Sorcières, Amercoeur ou encore Jeudi Soir, lequel deviendrait Gallarus en 2001. Des amateurs de cette musique venaient de partout, de Namur, de Charleroi, de Liège, de la France...

 

Dans Jeudi Soir, Bernard Clesse était le joueur de tin whistle, aujourd’hui entre autres assistant de Direction au Centre Marie-Victorin des Cercles des Naturalistes de Belgique A.s.b.l. à Vierves-sur-Viroin.

 

Bernard Clesse : " Effectivement, j’ai longtemps fréquenté le château lors des soirées folk, en tant que danseur, musicien et spectateur. De très bons moments partagés dans une ambiance parfois humide et enfumée de la salle de spectacle mais ça faisait partie du charme de l’endroit". (3)

 

23 avril 1994 : Salon Ambroisine (à droite : Michel Jacqmain) - photo réproduite avec permission.

 

 

26 avril 1997 : Orion - photo réproduite avec permission.

 

En novembre 2003, Michel Jacqmain, guitare et bouzouki dans Jeudi Soir, annonçait :

 

"Nous avons le cœur gros, mais cette année, nous n’entreprenons pas de programmer une saison de bals au château de Fagnolle. Ces temps derniers, les talentueux musiciens et maîtres à danser, amateurs sympathisants et quasi-bénévoles pour la plupart, de même que les joyeux animateurs organisateurs, amateurs sympathisants et totalement bénévoles quant à eux, avaient également en commun qu'ils venaient tous de très loin. Lorsque le public a commencé à se réduire à une poignée d'habitués, parfois eux aussi d'origine lointaine, les soirées étaient toujours agréables : que l'on se retrouve à quinze ou à cinquante-cinq, il fait toujours bon se retrouver quand la musique est bonne et que la danse secoue les pieds et les petits doigts. Mais c'est quand il s'agit de se remettre à préparer et porter une saison qu'il y a un moment où on se dit que les chemins pour arriver au château depuis Namur, Bruxelles, Charleroi ou Charleville sont parfois pénibles à parcourir à certaines époques de l'année.

Alors voilà. On est tristes pour ceux qu'on ne reverra pas cette année dans un cadre qui convient si bien à nos soirées."

"Surtout", Jacqmain continuait, " on remercie du fond du cœur Luc Lowagie qui depuis 1990 nous a offert une hospitalité royale dans son château plein de charme, où nous n'avons eu qu'à nous installer, jouer et danser." (4)

 

Michel Jacqmain nous confiait aussi : " Au début il y avait du monde mais plus tard il n’arrivait plus personne. La situation du château se dégradait : l’humidité, on ne pouvait plus se chauffer, les toilettes étaient dans un état abominable...  Il n’y avait plus personne qui voulait faire des dizaines de km pour de telles conditions. Donc on avait dû arrêter ces événements". (5)

 

Luc Lowagie, de son côté, tenait à faire savoir, que le château resterait quand même ouvert le 4ème samedi du mois pour continuer à accueillir "les danseurs, les musiciens et les mélomanes". En vain, le château ne verrait plus ces troubadours.

Texte : AvB - Correction : Valérie



(1) Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Pierre_Catoul

(2) Mail du 27 mai 2016

(3) Mail du 1 juin 2016

(4) http://www.canardfolk.be/Historique/Details/CF213Fagnolle.htm

(5) Interview téléphonique, mai 2016